Dilemne Cornélien, par Pierre Gendron

La chronique précédente était en ligne depuis quelques heures seulement que voilà-tu pas que Pierre Gendron nous écrit pour lui donner suite. L’humilité la plus élémentaire me pousserait à ne pas la publier car mon nom y est cité, mais enfin, je procède. Ce sera probablement bénéfique pour la thérapie de Pierre. Si vous trouviez que « Nominations à Cornell » était farfelu, watch out, sortez votre dictionnaire de latin, ici on nage en plein délire…


J’en veux un peu à Gilles d’avoir levé un coin du voile d’une autre vie qui naguère était mienne. La photo de «nerd» représente bien cette époque cornellienne.

Flash back sur cette époque à Ithaca N.Y.

À l’époque, la «Faculty» m’avait réquisitionné pour préparer le terrain en vue de l’érection du petit département de la «chain suck» en faculté plénière qui remplacerait la faculté affaiblie consacrée à l’étude de l’interaction entre l’appendice nasal rougeoyant et la natation de compétition.

Pourquoi m’a-t-on réquisitionné pour être co-fondateur (avec le «undergraduate» de l’époque Gilles Morneau) de cette chaire universitaire?

Tout simplement parce qu’a ce moment là je faisais l’exégèse de l’œuvre de Sénèque, plus spécifiquement sa série de textes scientifiques: «Les questions naturelles».

On le sait, ce sage qui a conseillé l’empereur romain Claude, qui a aussi été le précepteur de Néron était un touche- à-tout de la pensée. Son œuvre dramatique (pour faire contrepartie au grec Euripide, très à la mode à l’époque) se jouait dans des théâtres bâtis en hémicycle. La dernière syllabe de ce mot m’a mis la puce à l’oreille. Est-il pensable que Sénèque ait traité du cycle (deux fois plutôt qu’une) dans son oeuvre scientifique?

C’est avec avidité que j’ai foncé dans la bibliothèque Olin pour y scruter les manuscrits microfilmés. Quelle ne fut pas ma surprise de lire dans le livre 6 ce titre:De parva regina

Eureka! mon intuition était bonne (n’est ce pas la base de toute découverte scientifique) !

Sénèque avait traité du vélo dans son oeuvre scientifique. Mais il fallait aller plus loin. A-t-il traité plus spécifiquement du «chain suck»? L’histoire de sa vie nous amène à penser que oui car son œuvre a été écrite du temps où il enseignait à Néron. Ce dernier, tout jeune, avant que la boisson et la drogue ne le rendent si sinistre a pratiqué une forme rudimentaire de cyclisme.

Comme il était porté à tout essayer il a décidé de faire des randonnées endiablées un peu partout à Rome Il a vite compris que la Via Appia était pour les jambes glabres des éphèbes, il a par conséquent donné sa préférence à des endroit comme l’Île du Tibre et autres lieux peu développés comme le Mons de Saxa ou le Mons de PulchraAira.

C’est donc à partir de cette information et de mon expérience personnelle que j’ai extrapolé la possibilité de la présence du chain suck dans l’œuvre de Sénèque…

Et ce vieux sage (qui a dû se suicider plus tard-à la demande-menace de Néron lui même—quelle ingratitude réservée à celui qui l’a formé) a développé le sujet dans son fameux chapitre dont le titre dit tout: De catena captiva.

Et ma joie fut à son comble quand les trois chapitres suivants sont apparus dans la lumière crue de mon lecteur de microfilm. Ainsi son titre général (De catena captiva, se divise en trois excellents traités: le «Lutum factum» un peu dégueulasse, le très scientifique «Magnus discus nimis vicinitus» et enfin le controversé «De obsoleta catena» qui sont encore des références 2000 ans plus tard. Gary Fisher aurait eu intérêt à les lire plutôt qu’à se pavaner la barbichette et se dire inventeur du MTB.

C’est donc encore sous le choc en train de songer à devenir le propagateur de ces découvertes que déambulant sur le campus, sur les rives du Cayuga, je suis tombé sur l’étudiant (undergraduate) Gilles Morneau qui venait d’être expulsé de l’équipe de field hockey de Cornell. À le voir marcher on sentait que son énergie se devait d’être canalisée. Mon intuition était bonne car, je l’ai appris plus tard , une «sorority house» située proche du Weill medical college se plaignait de le voir tourner trop souvent autour des locaux consacrés à l’enseignement de l’anesthésie.

Notre rencontre fut brève et pleine de promesses. Nous partions en mission, en croisade contre le «chain suck».

Je devais rester en Amérique pour gérer la nouvelle faculté tandis que Gilles (qui est devenu depuis «senior researcher») devait parcourir le monde pour porter la bonne nouvelle. La Patagonie, l’Amérique du Nord, l’Europe ont été ses champs de recherche et d’expérimentation. Son corps en porte encore les traces de ce dévouement à la limite du sacrifice.

Ainsi ses cuisses souffrent en permanence d’hypertrophie qui l’empêche de faire de la course à pied. Cette hypertrophie est scientifiquement appelée la démarche ratitienne.

Sa mission l’a mené à fréquenter les plus grands praticiens du vélo de montagne mondial. Il a été obligé aussi par souci de respect des coutumes des endroits visités de pratiquer des rituels qui l’ont bouleversé. Ainsi des exercices traumatisants comme le gay-roping, le mosh pit et le terrible accueil du huissier ont été à des moments de sa vie son lot quotidien.

C’est donc avec plaisir que nous vous présentons cette brochette de chercheurs qui vont continuer l’oeuvre entreprise il y a quelques années.

Comme vous pouvez le voir, chacun de ces chercheurs est disponible et se fera un plaisir de vous informer de leurs recherches et d’accueillir vos témoignages. Seule Deirdre Shoemaker se refuse de publiciser son adresse de courriel. Nous respectons ce choix car ces derniers temps elle a subi de grandes pressions suite à la publication de sa recherche: «Est-ce le vélo de montagne ou CHOI qui cause l’impuissance? Étude comparative des effets prolongés de l’usage de l’un ou l’autre et de l’un et l’autre sur le cycliste de montagne»


Lexique:

De parva régina (La petite reine)
De catena captiva (La chaîne captive)
Mons de saxa (Montagne des Roches)
Mons de pulchra aira (Mont Bel air)
Lutum factum (À cause de la boue)
Magnus discus nimis vicinitus (Le grand plateau trop proche)
De obsoleta catena (La vieille chaîne).