17 décembre 2003:
Voici l’excellente chronique tant attendue d’Antoine Proulx
(AP ou Flipside) concernant les systèmes de transmission de vitesses
internes.
Une chaîne n'est aussi forte que son maillon le plus faible L’industrie du vélo de montagne (VM) a fortement évoluée depuis ses premiers balbutiements dans les années 1980. Des vélos complètement rigides en acier qu’ils étaient, ils se sont rapidement transformés suite aux multiples innovations technologiques pour devenir les montures hyper spécialisées que nous connaissons maintenant. Les innovations les plus marquantes pour l’avancement du sport ont sans doute été les systèmes de changement de vitesses indexés, les pédales à déclanche rapides, les fourches à suspensions, la technologie des cadres à suspension arrière et les freins à disques. À partir de là, les innovations technologiques ont plutôt porté sur l’amélioration des technologies existantes : réduction du poids grâce à de nouveaux matériaux, meilleures gommes pour les pneus, meilleures performances des suspensions, élaboration de stratégies diverses pour améliorer les caractéristiques de pédalage des vélos, etc. Merveilleux n’est-ce pas? Votre bête de XC ou de DH flambant neuve semble sortir d’un film de science-fiction si on la compare aux vélos d’il y a 10 ans. Pourtant, un élément des vélos actuels est resté pratiquement inchangé depuis des années et commence à paraître sérieusement archaïque: le dérailleur arrière! Ce fameux dérailleur arrière qui a mis fin à de nombreuses journées de vélo, particulièrement chez les descendeurs, serait-il en voie de disparaître? Il se pourrait bien que oui. Puisque les roches risquent fort de ne pas disparaîtrent de nos pistes dans un avenir rapproché (espérons le…), deux écoles de pensée s’affrontent maintenant pour offrir un système de changement de vitesse moins susceptible d’être endommagé par les abus répétés des descendeurs et freeriders. D’une part, il y a Shimano qui offre pour 2004 son nouveau système SAINT, un dérailleur traditionnel plus solide qui est fixé sur l’axe de la roue arrière de manière à éliminer le risque de plier ou arracher la patte de dérailleur lors d’un impact. D’autre part, il y a ceux qui travaillent à tout simplement éliminer ce dérailleur et à le remplacer par un système de boite de vitesse interne.
Le premier vrai effort pour offrir un système de boite de vitesse
interne suffisamment robuste pour survivre aux rigueurs du DH nous est
venu d’Allemagne par la compagnie Rohloff.
C’est en 1996 qu’ils ont commencé à tester leurs
premiers prototypes de “Speedhub”, un moyeu arrière
comprenant une boite de vitesse interne de 14 vitesses, permettant ainsi
une plage de rapports comparable à un vélo équipé
de trois plateaux à l’avant et d’une cassette à
l’arrière. Le Speedhub est disponible comme produit commercial
depuis 1999. Les avantages d’un tel système sont multiples
: système scellé opérant dans un bain d’huile
requérant peu d’entretien, large plage de vitesse, possibilité
de changer de vitesse dans pédaler...et assurance de ne pas avoir
à marcher ou à effectuer une réparation de fortune
après avoir endommagé notre dérailleur arrière
sur une roche!
L’avenir des transmissions internes pour les vélos de DH semble donc se diriger vers les boites de vitesses montées directement dans le cadre. Cependant, le seul produit commercial disponible présentement permettant de réaliser cela est le Rohloff Speedhub, qui est à priori un moyeu arrière qu’il est nécessaire de modifier si on veut le monter sur un cadre. Dans le but de standardiser la technologie des transmissions internes pour les vélos de montagne, le consortium G-BOXX a récemment vu le jour. Celui-ci est composé de Karl Nicolai, fondateur de la compagnie Nicolai, et de Dave Weagle, fondateur et ingénieur des compagnies Evil et e.thirteen. Le projet G-BOXX consiste à mettre au point un nouveau standard international de boite de vitesses interne. Deux buts principaux sont visés par le projet G-BOXX: 1. Permettre aux fabricants de vélos de développer des vélos à transmission interne sans avoir à développer la transmission elle-même. 2. Permettre aux fabricants de transmission d’offrir des transmission pouvant être utilisées par n’importe quelle compagnie de vélo. La technologie des boites de vitesses est donc à nos portes mais il reste évidemment beaucoup de développement à faire avant que tous les vélos de montagnes soient équipés d’un telle transmission. Outre la fiabilité à long terme, qui ne semble d’ailleurs pas être un problème pour le système Rohloff, le plus gros défi qu’attend cette nouvelle technologie est possiblement la réduction du poids pour rendre ce dernier comparable au système de transmission par dérailleur actuel. Lorsque ce défi sera relevé, ce sera fort probablement ce qui va donner le coup de grâce à notre bon vieux dérailleur... et j’en connais quelques-uns qui ne vont pas pleurer! Reste maintenant à voir comment Shimano et SRAM vont réagir à cette nouvelle technologie qui va sans aucun doute rapidement gagner en popularité. Vont-ils sauter dans le train ou tenter de l’arrêter? Histoire à suivre... P.S. Antoine a écrit cette chronique pour notre plus grand plaisir tout en faisant ses études au doctorat en physique. Je le remercie pour le temps qu'il y a consacré et la chronique est vraiment intéressante à lire. Rassurez-vous, Antoine est loin d'être une «tronche à lunette» mais plutôt un très «bon jack» avec qui il est toujours agréable de rouler ou de discuter. |