Hommage à nos inventeurs: La draisine à Reynald

La draisine, mon grand-père connaissait bien. Il travaillait pour le CNR et était familier avec ce petit chariot sur rails, souvent propulsé à bras. La draisine existe aussi en version à pédale, utilsée surtout en Europe.

Dominique Babin, illustre membre de l’illustre Club Durand, connaît bien les draisines lui itou. Il nous raconte comment, dans sa Gaspésie natale, les bricoleurs comme Raynald Babin exploitent les voies ferrées à des fins récréatives.


Bin oui, mon Raynald de papa possède une solide réputation de bizouneux, gosseux et patenteux dans son pitoresque village de Caplan. Il s’était même fabriqué un avion il y a quelques années. Il a volé avec une dizaine d’années et la revendu depuis peu, après avoir suffisamment fait peur à ma mère. Crois-le ou non, mais il s’est même crashé avec, après avoir perdu en vol les deux pales du moteur ?!? Je pourrais t’en dire long, mais le sujet n’est pas là.

Raynald n’a pas de « métier » comme tel, sauf peut-être un cours de mécanique dans son jeune âge. Il était plutôt gardien de sécurité au » moulin » de New-Richmond (pâte et papier de Smurfit-Stone) qui a malheureusement fermé ses portes au mois d’août dernier. Heureusement pour lui, sa retraite était prise depuis deux ans.

Raynald, tu l’as croisé sans t’en rendre compte, puisque depuis maintenant 5 ans, il ravitaille les Durands-boyz and girlz au RTG. Hé oui, il est le fantastique hôte, avec sa femme Colette, depuis 2001 d’une trentaine de vététistes qui couchent chez lui à Caplan. Crois moi qu’il, et elle, seraient très déçu que cela prenne fin… Ils en mangent !

Pour revenir à son prototype, voici un peu son histoire;

Mon père étant un assez bon sportif, il trouvait qu’il y avait un espèce de vide entre la saison de vélo et celle du ski de fond. Ce vide représente en fait l’automne où la neige se fait attendre et le printemps où cette même neige ne finit plus de s’en aller. De plus, mon papa est un assoiffé de plein air, donc pour lui les gyms et/ou le bord de la route, ça le fait pas tripper bin, bin… Autre raison, l’économie étant ce qu’elle est en Gaspésie, le passage du train se fait de plus en plus rare. C’est pas mêlant, me dit-il, le train passe trois fois par semaine, c’est pas dur de s’en rappeler. Pis de toute façon, j’ai un miroir pis un train, tu l’entends longtemps assez d’avance… (ce sont ses paroles). Toujours selon lui, ça faisait longtemps qu’il voulait explorer les endroits où le train passe. Pas loin de Caplan, vers l’ouest, le train passe sur une falaise escarpé entre mer et montagne, de toute beauté selon ses dires.

Techniquement parlant, c’est plus difficile pour moi de te décrire la chose pour la bonne et simple raison que je ne l’ai pas encore vue. Ce que je sais, c’est que les deux vélos sont fixé ensemble par des boulons et vis, le tout étant fixe. Seule la roue de son côté peut et doit pivoter que très légèrement. Il y a 5 pièces de Téflon reliées aux cadres et fourches de chaque roue des deux vélo. Ce que je comprends, c’est que la fourche du vélo-guide (le sien) comporte un double guide de Téflon qui sert de gouvernail. Une espèce de vis de resserrement qu’il ajuste au besoin selon les virages des rails.

Le 2e vélo, le plus petit, n’a été choisi que par défaut. C’est le vélo trop petit de ses petits enfants. D’ailleurs, je compte bien lui faire greffer un vélo à ma taille pour aller me promener avec lui… Pour l’instant, il y a installé une plate-forme poreuse pour sa fidèle chienne Koli.

Côté performance, c’est pas les gros char. Disons aussi que mon père, en bon gaspésien qu’il est, n’est pas le plus pressé et le plus stressé du monde, plusieurs personnes te le confirmeront. Selon lui, et après avoir douloureusement expérimenté la chose, la vitesse maximale est fixée à 15 km/h. « plus vite que ça, tu dérailles… » me dit-il. Les rails sont également « maganés » aussi. À quelques endroits, les rails sont plus ou moins étroits. Un jeu de ½ pouce selon lui. Qui plus est, les passages à niveaux sont à y penser aussi… Faut pas que le Téflon soit trop profond pour pas accrocher quand il les traverse, ce qui fait qu’elles sont moins stables (Téflon) parce que plus courtes. Le chien aime pas ça quand ça déraille non plus…

Puisque l’on parle de traverse à niveau, tu t’imagines pas les passants qui s’attendent à voir passer un train quand Raynald s’en vient avec son bidule. Il m’a raconté deux ou trois anecdotes à ce sujet où il passait derrière les maisons le long de la mer. Les résidants n’ont pas le temps de le rattraper à son passage, mais l’attendent de pied ferme quand il revient sur ses pas. » Ils sortent des maisons en pantoufle » me dit-il.