Aventures en Mongolie: Ulaanbaatar

Le 7 septembre fut une journée mouvementée pour nos aventuriers Antoine et Nicolas, qui achèvent sur une note angoissante cette tournée au pays de Jeff Fillion.


Dernier message de Mongolie. On quitte demain matin mercredi pour Beijing.

Avant de quitter, on ne pourrait passer sous silence notre journée du 7 septembre, passée sous le thème du retour au Moyen-Âge. C’est la journée où nous avons quitté la charmante ville de Tsetserleg sous des averses de neige intermittentes. Rappelons que nous y avions passé 3 jours auparavant. Donc nous quittons vers 13h00. Tout se passse bien, aucun signe anormal. Nous apprendrons 2 jours plus tard à Harhorin que la ville a été fermée par les autorités locales vers l7h00 le 7 septembre. La cause: épidémie de Peste Noire!

La ville a été mise en quarantaine pour une durée indéterminée. Personne ne pouvait entrer ou sortir. Quel bon timing! Nous ne savons toujours pas si la quarantaine dure toujours.

Rappelons que la Peste Noire, aussi appelée Peste Bubonique, est une maladie endémique en Mongolie. Les marmottes mongoles sont porteuses de la maladie depuis la nuit des temps. La chasse aux marmottes est particulièrement populaire à la fin de l’été pour faire des BBQ. Elles transmettent la maladie aux humains par les puces qu’elles portent dans leur fourrure. Le taux de mortalité chez l’humain est de 60%. La peste a décimé le tiers de la population européenne au Moyen-Âge. Nous avons donc eu la frousse pendant quelques jours, surtout que Nicolas a souffert de problèmes digestifs au même moment. Je peux vous dire qu’il surveillait sa température et ses ganglions régulièrement!

La fin de journée du 7 septembre allait nous en faire voir de toutes les couleurs. Après une journée de vélo passablement difficile en raison du vent froid et de la neige, on décide de camper à l’abri des murs d’une étable sur le flanc d’une colline. On l’avait déjà fait auparavant et tout s’était passé sans problème.

Ce soir-là, au moment où nous montions la tente, toutes nos sacoches étant étalées par terre, la visite débarque en nombre supérieur à la normale. En effet, on voit 5 jeunes adultes/ados se pointer à toute vitesse sur la plaine, le sourire aux lèvres, sur 2 chevaux et une moto. Honnêtement, on avait pas très le goût de jouer le jeu ce soir-là.

Mais bon, on fait comme d’habitude. On fait essayer nos vélos en souriant. Puis ils s’installent tout près de nous, les yeux rivés sur nos affaires qui traînent ça et là. On finit de monter la tente. Un des ados, appelons-le le fatigant, est particulièrement tannant auprès d’Antoine. Il a l’air saoul et me demande de la vodka et des cigarettes. On n’en a pas.

Puis ils veut entrer dans la tente. Moi ça ne me dit rien. Je m’assis dans la tente les pieds dans le vestibule. Nic fait pareil. Le fatigant commence à me prendre un pied puis l’autre, et tente de m’enlever les couvre-chaussures et mes souliers. Je résiste mais commence à être écoeuré. Nic est plus patient et rit comme un innocent en jouant le jeu.

Je suis toujours occupé à me défendre contre le fatigant lorsque Nic perçoit dans le visage des 4 autres visiteurs un sentiment de panique. Nicolas observe par le vestibule la venue d’un 6e joueur. Pour ceux qui ont vu le Segneur des Anneaux, la scène ressemblait en tout point à celle ou le Balrog fait fuir les orques qui ont encerclé les héros dans les mines de La Moria. Les 5 jeunes Mongols se mettent alors à courir dans tous les sens, cherchant une cachette.

Nic m’annonce alors de me préparer à quelque chose d’anormal. Curieux, j’ouvre alors le haut de mon vestibule pour observer le 6e joueur (le Balrog). Du haut de son cheval, l’air très malin, plus vieux que les autres, il agite son fouet et le fait claquer violemment dans l’air. J’ai peur. Restant sur son cheval dont les sabots avants piétinent le devant du vestibule, il me regarde l’air menacant et me fait le signe des cigarettes. Je vous jure que j’aurai bien aimé avoir un paquet de Craven A vertes sur mon épaule sous mon t-shirt.

Toujours assis dans la tente la tête sortie par une petite ouverture du ‘zipper”, je lui fais signe que je ne n’en ai pas à la maniere de Gérard D Laflaque. Il fouette l’air une couple de fois. Instinctivement, je me réfugie la tête à l’intérieur et évite une couple de coups de fouet qui atteignent la toile de la tente. Le Balrog se promène entre la tente et les jeunes Mongols qu’il tente de fouetter aussi. Nic et moi on capote pas mal, surtout moi!

Le Balrog descend alors de cheval et va du côté de Nic avec qui il sera beaucoup moins terrifiant. Le fatigant revient me voir et continue de m’achaler.

Quelques instants plus tard, perdu dans mes pensées, Nic m’annonce: “Ok Tone, on décampe au PC”! Ce à quoi je lui réponds: “yé quelle heure?”! Signe évident que je commençais à perdre la carte, les émotions à fleur de peau.

On réussit à remballer toutes nos sacoches. Je suis spécialement rapide, à la grande surprise de Nic. La panique doit me rendre plus vite. C’est une drôle de situation. C’est d’abord chacun pour soi pour l’étape de charger nos velos. Opération sauve-qui-peut.

Nic se débrouille mieux que moi à ce jeu, son vélo étant plus près de sa sortie de tente. Je me fais piquer une sacoche par le fatigant qui se roule en petite boule autour. Je capote en maudit. Il n’est pas question que je la lui laisse, mais que faire?

Je réussis finalement avec force à lui enlever. Pendant que je suis à installer mes 4 sacoches sur mon velo, Nic se fait enlever la tente par le fatigant qui a remonté sur son cheval. In extremis il lui retire et me la jette. Je prends le motton de tissus et je l’attache à mon velo en vrac.

Le coeur battant à 160 ou plus, on enfourche nos bécanes et décampe à travers la plaine, cherchant à regagner la route principale au PC. Pensant en avoir terminé avec ces débiles légers, on ne voit-y pas le fatigant nous pourchassant sur son cheval en grimaçant comme un guerrier de Gengis Khan. Il s’attaque à nous à tour de rôle. C’est hot!

Après une couple de bousculades et de feintes de la part de Nic, il semble nous quitter pour de bon. On respire un peu. Il revient, cette-fois-ci muni d’une moitié de fourche à foin (la fourche en métal). Là, on a vraiment la chienne qu’il nous transperce!

On réussit finalement à se sauver. On couchera 5 km plus loin, au sommet d’un col, à l’abri des regards. Fin du 7 septembre maudit. Pour Nic et moi, c’est notre pire contact à vie à l’étranger avec des locaux. Pour le reste du voyage jusqu’a UB, nous limiterons malheureusement nos contacts avec les nomades et nous choisirons nos sites de campement souvent non loin des cols, cachés des regards par les montagnes.

Nous expliquons ce comportement étrange par le fait que ces gens-là sont sur le circuit touristique principal. Contrairement aux Kazaks de l’ouest, ils en voient passer en masse des touristes. Ceux-ci sont maintenant associés à des distributeurs de cigarettes et de vodka. Décevant mais typique. Fin des folles aventures en Mongolie. Nous essaierons de vous raconteur nos belles rencontres et nos meilleurs moments dans un autre message. Évidemment, il y a du beau et du bon en Mongolie! Mais nous avons jugé que nous devions d’abord vous raconter cette journée folle.

En terminant, nous avons reçu récemment un courriel d’Annick Dufresne, la directrice de la Fondation « Sur la pointe des Pieds ». Elle me mentionnait qu’elle avait commencé à recevoir des dons de certains d’entre vous et tenait à vous en remercier, et moi de même! Pour ceux qui souhaiteraient le faire, il est bien sûr encore temps, tous les détails se retrouvent sur le site de la fondation http://www.pointe-des-pieds.com. Les jeunes ont d’ailleurs complété en août un séjour de deux semaines en canot dans le Baie de James. Merci de votre support!

A bientot, de Beijing.

Antoine et Nicolas