Christiane Bouchard nous a fait honneur au Costa Rica au début du mois en terminant 11e sur 40 femmes inscrites à La Ruta. En terminant sa course, la pauvre a subi un coup de chaleur, la turista, la grippe et une sinusite mais elle nous assure que maintenant elle se sent mieux. Et disposée à nous raconter son aventure!
Nous étions autour de 550 participants, dont 40 femmes (un record) pour la quatorzième édition de la ruta 2006. Plusieurs pros étaient invités, dont 8 filles. À San Jose, au départ de la navette pour se rendre à Jaco (point de départ du 1er stage), on sent déjà la fébrilité de cette course. Je suis dans la file pour apporter le vélo dans le camion aux cotés de Tinker Juarez… wow! Sur la route, l’autobus arrête à un pont pour nous montrer les gros crocros americains…méchants gros crocodiles, ah, je savais pour les serpents, grenouilles et scorpions mais j’avais oublié ceux-la. L’inscription est un peu bordélique et se fait plutôt en Espagnol. On me donne ma plaque avec un drôle de sourire, car j’hérite du # 911. L’art de se faire remarquer. Je fais connaissance avec ma room mate, une Américaine du Colorado. Je croise au souper un gars avec un chandail de MEC, eh oui, je ne me suis pas trompé, c’est Stefan Mueller, un Québécois déménagé à Vancouver l’été dernier.
Comme tous les ans, le départ est à 5h15 am. Merde, malheur, mon odomètre ne fonctionne pas. On comprendra pourquoi plus tard. Le stage #1 de 97.5km et 4400m de dénivelé dans la boue est long. Ils ont rajouté une montée de 8 km dans la boue cette année pour augmenter la difficulté. Je finirai ce stage en 10h 43min, avec le sourire et un dos en compote. J’ai rejoint Stacy ma room mate au quart de la course et on a roulé plus de la moitié ensemble. J’ai dû faire un 3h de hike-a-bike. Finalement, comme je ne savais pas combien de km il me restait à faire durant la course, j’ai toujours gardé le moral. Je regardais 2 pieds en avant de ma roue, et je vivais l’instant présent. Pura Vida!
Au retour vers San Jose dans l’autobus, urgence 911!!! Je dois arrêter et pisser au beau milieu de l’autoroute en pleine heure de pointe…l’art de se faire remarquer.
J’appréhendais le stage #2 avec la montée du volcan Irazu. Une montée de 35 km sur 3010m. J’arrive au check point 2 en pleine forme et je m’attend à me rendre au cratère (j’ai encore mal lu la carte). Mais non, ça descend et descend encore, shit j’ai pas hâte de remonter!! Quand j’arrive au check point 3, je demande « quand va-t-on remonter? », pour me faire dire que j’étais au sommet au check point 2. Chus dans une bonne journée! Faut dire qu’il y avait tellement de monde sur le bord de la route pour nous encourager que mon taux d’adrénaline était au sommet. Le payage est super. La descente de 30 km est malade. De temps en temps on croise des Costaricains à cheval trainant le cafe dans un sac de jute.
Je finis en 6h36, 3 min derrière Stacy, qui m’a encore clenché dans les derniers km. Je m’apercois que mon nom n’est pas sur la liste. On me dit que je suis disqualifiée parce que je n’ai pas montré ma licence UCI…. Persécution! je l’ai montrée à l’inscription! Une heure plus tard, après avoir rencontré la commissaire (et enlevé mon chandail) tout est réglé… c’est ce que je croyais. Pour le 2ème dodo, on se retrouve dans une superbe hacienda au milieu des champs de canne à sucre avec comme chambre la suite royale. Un bain tourbillon dans l’immensce salle de bains, un balcon avec un spinner ultramoderne ( je le laisse à Stacy) un salon, etc. Je me réveille fraiche et dispose pour affronter la dernière journée, que je crois être la plus facile. Je me vois en peloton faire les 25 km pavés. On déjeune à 4h30, grâce au conseil de Mireille et je sauve la troupe d’une famine certaine car le déjeuner était supposé être servi à 6h. L’autobus viendra nous chercher à 5h 30.
On est à Aquires, un coin magnifique. Je trouve le matin friquet mais les autres ont chaud. Coudon, j’ai peut-être un début de grippe. Le 3ieme stage consiste à faire 120km et 1700m de dénivellé avec comme finale une section de chemin de fer sur 45 km. Naturellement, on remonte la descente de la veille. La température augmente. Je pars lentement, mais je reste sur le vélo. Sur l’asphalte, je suis sur le gros braquet. Je rejoins encore Stacy et on dépasse une costaricaine qui est 6ème. On descend et je perd Stacy. On arrive au premier village qui est très pauvre. Les enfants font la ligne pour nous serrer la main. Pis là, je pogne mon waterloo…un pont de voie ferrée pas trop long, mais il manque des planches.
Je prends mon courage a deux mains et je le passe. Je suis dans la roue d’un grand gars qui a un bon rythme. Je ne veux pas me retrouver seule dans cet endroit. Je lui demande to stick with him…no problem. On arrive à un autre pont…fuck…je vois à peine la fin et il est haut d’environ 100 pieds.
Le gars m’encourage et finalement le cameraman m’aidera à traverser car je suis figée entre deux planches, je vois la rivière en bas…et les crocos dans ma tête. Sur 20 km le gars m’aidera et me tirera plus qu’à mon tour. Mais, à 20 km de la fin, il casse et c’est moi qui va le tirer jusq’au fil d’arrivée en l’attendant 3 fois pour qu’il se repose. Pas question que je l’abandonne dans ce four au milieu de nowhere entre deux plants de bananes. On finira ensemble après 8 hres. Lui, un Guatemaltais de 6 pieds et moi une petite Quebecoise de 5 pieds. Ont s’est serrés, les deux en larmes et il m’a dit qu’il n’aurait pas fini sans moi et moi sans lui. Ce fut le moment le plus intense de cette aventure. 10 min. plus tard, j’ai commencé à pas filer. J’ai pas fêté avec ma gang d’Américains. Je me suis couchée sur la plage avec des frissons. Je paye pour mes folies ou j’ai un coup de chaleur? On m’a encore oublié sur la liste, mais je ne suis pas assez en forme pour faire un strip-tease et je ne sens pas très bon. Non plus, je laisse tomber. Mon prochain défi: faire le voyage d’autobus sans faire de dégats. Je finirai dans une bus nolisée par mes Américains, ils prendront soin de moi. J’ai gagné mon dernier défi, encore grâce à la solidarité.
De finir cette course était mon objectif. J’ai fait mieux car j’ai créé des liens, j’ai admiré le paysage, je me suis amusé et j’ai surmonté ma peur des hauteurs. Malheureusement, la moitié des participants n’ont pas eu cette chance. J’ai eu l’impression que le monde a conspiré pour que je réussisse mon défi. Même mon vélo a été parfait. Merci à tous!
Si vous voulez faire la Ruta, dépêchez-vous, car il y a des rumeurs que la 15ème édition serait la dernière! Il ya aura 4 étapes plutôt que 3. Et l’organisation était impeccable. Pura Vida!
Matanta Cri-Cri