Joyeuse Halloween, tout le monde. Souhaitons que le spectre du dopage soit loin derrière nous et ne vienne nous hanter à nouveau en ce jour où la mascarade se doit d’être festive plutôt que honteuse. En ce jour de réjouissances légères, portons nos pensées vers la lumière, inondons nos esprits d’idées positives. J’ai choisi comme déguisement une soutane, oui, une belle soutane genre de Jedi, qui fera de moi l’aumônier de ce site Web pour la journée. Alors, mes biens chers frères, je vous propose de vous recueillir, de prendre un moment d’arrêt dans votre vie trépidante, pour vous pencher sur la notion de pardon. Nous recherchons tous, à un moment ou un autre de notre vie, une prière du pardon. Le pardon est un cadeau de très grande valeur, aussi difficile à obtenir qu’à donner. Le pardon est essentiel; il nous libère de nos erreurs passées et nous redonne espoir dans l’avenir. C’est pour le pardon que Jésus-Christ est venu sur la terre et est mort pour l’humanité.
Assez déliré, vous vous rappelez l’avant-dernière chronique, où j’ai soulevé le fait qu’un dopé notoire soit devenu sélectionneur pour l’équipe nationale belge? J’ai ajouté en boutade que Arnaud Papillon pourrait revenir après sa suspension comme coach de l’équipe du Québec. Cette boutade a « heurté » des gens à la FQSC et on m’a signifié poliment que » j’aurais pu m’abstenir de faire ce commentaire « . J’en ai donc profité pour demander quelle était la position officielle de la Fédé sur le retour à la course active pour un coureur ayant purgé une suspension. Est-ce vraiment scandaleux de penser qu’un tel coureur puisse grimper à nouveau les échelons jusqu’à occuper une position de pouvoir? Jusqu’où peut et doit aller le pardon?
Après tout, suite à la chronique sur Papillon, certains m’ont trouvé trop sévère… à preuve cet échange avec un ami collègue coureur:
Pascal N.: « (…) Tu sembles vouloir barrer à vie des gens qui se font prendre de tout le milieu cycliste, même en tant qu’entraineur. C’est pas un peu fort? Je te rejoins sur tout, mais je suis prêt à donner une seconde chance à une personne qui a purgé sa peine. Quitte à le surveiller de plus près. Il n’a tout de même pas violé un enfant. »
Gilles : (…) Tu accepterais vraiment qu’un coureur qui a pris la décision de se doper dans sa carrière soit l’entraineur de tes enfants, si ceux-ci étaient de haut niveau? Pas moi, jamais!
Pascal N.: (…) Un entraineur « ex-dopé repentant » pourrait peut-être dire à mon gars de ne pas faire la même gaffe que lui car cet erreur a détruit sa carrière et surtout sa réputation. Un « ex-dopé repentant » est le mieux placé pour le dire, non?
Hé oui, Pascal, ton commentaire m’a fait beaucoup réfléchir. Sans compter le fait que tu aies présumé que je m’inspirais de Jeff Fillion. Ouille :-). Mais je m’écarte… revenons à la position de la Fédé. Discussion, donc, avec Louis Barbeau :
Gilles : Les gens chez vous ont-ils été heurtés parce que cette éventualité est totalement immorale? Quelle est la politique de la fédé face à un coureur coupable de dopage qui revient à la compétition active après une suspension? Le pardon n’est-il pas total? Techniquement, ne pourrait-il pas gravir les échelons et accéder au titre d’entraineur de l’équipe du Québec, ou bien c’est écrit noir sur blanc à quelque part que c’est impossible?
Louis : Mon commentaire visait simplement à signaler que la FQSC, contrairement aux Belges, n’envisagerait jamais engager comme entraîneur un ancien coureur qui a déjà été reconnu coupable de dopage. Disons que le parallèle, même s’il se voulait ironique, était maladroit.
Gilles : Toutefois, la Fédé accepte qu’un coureur repenti devienne directeur sportif d’une équipe où figurent de jeunes coureurs. (je fais allusion à Érik Lyman, qui après avoir annoncé sa retraite suite à une suspension de 4 ans, est revenu à la compétition en 2005 et depuis 2010 agit comme directeur sportif de l’équipe Team Spirit, qui comporte des coureurs U23) N’est-ce pas aussi éthiquement inacceptable?
Louis : Pour moi, j’ai un problème à ce que quelque individu que ce soit qui a commis une infraction de dopage puisse exercer un rôle quelconque autre que celui de coureur, une fois que sa sanction est terminée. Nous devons toutefois respecter les règlements de l’UCI.(…) Erik Lyman a mis sur pied cette équipe. Aller jusqu’à tout récemment, il n’existait aucun règlement empêchant une personne de diriger une équipe, indépendamment du fait qu’il ait déjà été reconnu coupable de dopage dans le passé, dans la mesure où il a purgé sa peine.
La situation sera désormais différente avec l’introduction d’un nouveau règlement de l’UCI à cet effet.
Voici un compte-rendu de la réunion du Comité directeur de l’UCI tenue au mois de juin dernier, ainsi que la modification au niveau de la réglementation UCI qui a suivi.
Communiqué suite à la réunion du Comité directeur
Règlement UCI – article 1.1.006.2
Gilles : Intéressant. Pratiquement, quel est l’effet sur Erik Lyman?
Louis : Ce dont je ne suis pas certain, c’est le caractère rétroactif de cette mesure, puisqu’il est écrit à la toute fin que « cette clause s’applique en cas de violation commise dès le 1er juillet 2011 ». Est-ce que ça veut dire que la clause s’applique pour une infraction commise après le 1er juillet – il semble que oui – ou qu’elle s’applique à compter du 1er juillet pour tout individu qui aurait commis une telle infraction indépendamment de la date à laquelle elle aurait été commise? En lisant la version anglaise, j’ai l’impression que cela s’applique pour des infractions commises après le 1er juillet 2011. Je compte cependant vérifier directement auprès de l’UCI.
Je résume : La Fédération des sports cyclistes possède certains principes moraux, principes qui s’arrêtent toutefois lorsque la réglementation de l’UCI a préséance.
Qu’en est-il des jeunes coureurs, de ces jeunes brebis encore pures qui doivent faire leur chemin dans ce monde tourmenté où les pommes de Satan pendent aux branches des pommiers à chaque virage des routes en lacets? J’ai demandé à Arnaud Gagnon, coureur junior révélé par la chronique précédente, son avis sur cette question du pardon.
Gilles : Toi, Arnaud, penses-tu qu’il faut pardonner une première offense telle que celle d’Arnaud Papillon? Ça te dérangerait-tu si après avoir subi sa suspension:
il revenait à la compétition?
Il revenait à la compétition et devenait coach de l’équipe du Québec?
Il revenait à la compétition et devenait ton coach chez Espoirs Laval?
Il revenait à la compétition et devenait coach d’une équipe de course provinciale?
Arnaud : Je pense personnellement qu’il faut savoir pardonner. Si M. Papillon n’avait pas annoncé sa retraite sportive, j’aurais été parfaitement d’accord pour qu’il revienne. On ne peut pas effacer le passé, ni oublier qu’il a triché, mais dans le cyclisme, il y a des règles qui définissent la punition pour chaque infraction. Dans deux ans, la suspension de M. Papillon prendra fin, à ce moment-là, il aura purgé sa peine, ni plus ni moins. Dans le cas où il choisirait alors de revenir au cyclisme, il faudrait lui pardonner et l’accepter, que ce soit comme athlète et/ou entraîneur. La suspension de deux ans a été jugée comme étant une punition suffisante pour un contrôle positif, donc dès lors qu’un athlète a fini sa suspension, nous nous devons d’agir comme si il n’avait pas triché dans le passé et considérer qu’il est maintenant honnête et qu’il a fait sa rédemption, sans quoi, il ne sert à rien de le suspendre pour deux ans, autant le suspendre tout de suite à vie (…)
Voilà de sages paroles, qui portent à être indulgent et pardonner. Oui, peut-être, ai-je été trop dur. Peut-être devrais-je pardonner, faire acte de contrition, donner une chance au coureur, comme on dit. Toutefois, (l’heure est grave, sortons les majuscules), TOUTEFOIS, vous serez d’accord que dans le cas exceptionnel où un ex-dopé devient directeur sportif d’une équipe au Québec, il marche sur des œufs. Il doit être particulièrement vigilant, EXTRÊMEMENT vigilant, et s’assurer que son équipe reste au-dessus de tout soupçon (surtout quand des victoires aux prestigieux Mardis de Lachine sont en jeu 🙂 ). Après tout, comme le disait Pascal plus haut, une personne qui possède une certaine expérience du dopage est mieux placée que quiconque pour déceler les signes et tenir ses coureurs loin du fruit défendu. Avouez que si jamais un coureur de son équipe se faisait pogner, ce serait un scandale MAJEUR!