Pierre Gendron, il y a bien des lunes, nous avait fait un portrait de la famille Gagné, coureurs en vélo de montagne. On y découvrait deux parents inculquant de saines valeurs à leurs enfants, via les voyages, le plein-air, le sport. On y découvrait deux jeunes prometteurs, Olivia et Raphaël, qui malgré leur jeune âge, se démarquaient par leur personnalité et leurs succès sur deux roues.
Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis, et on a réentendu parler de Raphaël l’an dernier, peu après le Raid Pierre Harvey, alors que la Fédération Québécoise des Sports Cyclistes l’a suspendu pour trois mois. Son crime? Avoir été trop pressé! Raph n’avait pas l’âge réglementaire pour participer au raid, mais il « l’avait dans la tête », comme on dit. Il était anxieux de participer à cette course, d’enfin pouvoir se comparer d’égal à égal avec les plus vieux. Il était fringant comme un jeune poulain prêt à s’élancer dans le pré aux cotés des étalons. Son père Simon, en toute candeur, lui avait prêté sa plaque pour qu’il participe à la dernière étape. Ça n’a pas fait l’affaire de certains, il fut dénoncé et la Fédération a dû sévir.
C’est ce « mauvais coup » qui a mis Raphaël « sur la map » comme on dit. Mais c’est déjà du passé et maintenant, ce sont ses performances qui parlent pour lui. Et qui commencent à parler fort. Talonné par un autre jeune talentueux, Éric Boily, Raphaël a fait preuve de constance et a remporté le cumulatif de la Coupe Québec. Pas étonnant qu’on l’ait nommé athlète de l’année, catégorie Espoir masculin au mérite cycliste québécois cette année. Pas étonnant que Louis Garneau l’ait choisi, avec sa soeur Olivia, comme bénéficiaires de sa Randonnée 2002. Pas surprenant non plus que pour la photo, Louis l’ait pris par l’épaule en se penchant un peu par en avant comme il sait si bien le faire avec les dignitaires.
Quand on parle de constance, les résultats de Raph sont éloquents: en 4 années de carrière, il n’a jamais abandonné une course. Ça veut dire 120 courses déjà, et devinez combien de podiums? 114! Cette année, il en a ramassé 21, sur 21 courses. À Saint-Félicien, il a réalisé le quatrième meilleur temps au Contre-la-montre, toutes catégories confondues. Et sa feuille de route continue comme ça, avec des performances qui le distinguent et laissent entrevoir des grandes choses pour l’avenir.
Cette année, il avait l’âge minimal pour participer au petit Raid Pierre Harvey. Il l’a fait comme un pro, sans s’énerver, des dires de Michel Leblanc, entraîneur de l’équipe du Québec, qui a roulé un bout avec lui et qui a décelé en lui depuis longtemps un talent exceptionnel. Je n’étais pas vraiment surpris de le voir arriver quelques secondes après moi, en 7e position au général, le sourire aux lèvres, très fier de sa performance. Raph n’a aucun complexe face aux élites, il déborde de confiance. C’est la marque des grands, qui savent à quoi ils sont promis. Quand on l’interroge sur ses objectifs, il répond sans hésiter, tout est clair dans sa tête:
En 2003, il en sera à sa deuxième et dernière année cadet, et il prévoit gagner les trois Coupes Canada disputées dans l’est.
En 2004, il se voit au Championnat du monde junior, dans le top 20
En 2005, il se voit Champion du monde junior, rien de moins.
Évidemment, les Jeux olympiques de 2008 sont en point de mire.
Avec des objectifs aussi ambitieux, Raphaël devra bientôt déborder du circuit provincial et il se trouve à un point tournant de sa carrière: Il doit trouver une équipe, des commanditaires pour l’appuyer, à long terme de préférence. Son jeune âge joue contre lui, car les commanditaires, c’est bien connu, sont prêts à payer pour ce que tu AS RÉALISÉ et non pas pour ce que tu VAS RÉALISER. C’est dommage, mais c’est ainsi. Raphaël devra faire preuve de patience et tôt ou tard, ses efforts seront récompensés par des résultats qui finiront par attirer l’attention. Pour ma part, je lève le flag bien haut et clâme à qui veut bien entendre: « Surveillez ce coureur, il ira loin! »
Dans peu de temps, Raphaël aura d’autres occasions de se frotter aux « grands » et je sens qu’on va se faire « smoker ». Il en a dedans, le jeune, il sait où il va et il y va très vite!