Un brin de causette avec Stéphane Croft

À l’émission Zone Libre des 17 et 24 novembre à Radio-Canada, Stéphane Croft, naturopathe et athlète de la région de Québec, a vu sa réputation en prendre un sacré coup. Au sein de la communauté cycliste, les révélations apportées ont suscité l’indignation. Comment un gars respecté comme Stéphane a-t-il pu faire des choses aussi graves? Sans cautionner sa pratique ou porter un jugement sur la façon dont l’information a été traitée, nous avons pensé lui offrir cette tribune pour qu’il puisse apporter sa version des faits.


Gilles:Après le visionnement des émissions Zone Libre, ma première pensée fut: «Ce gars-là est détruit.» Les derniers jours n’ont pas dû être faciles?
Stéphane:Quand le réalisateur d’une émission de télé te crie au téléphone (pour reprendre textuellement ses paroles): « Tu vas regretter de ne pas nous avoir donné d’entrevue » et « On va sinon te faire ben mal paraître« , on ne peut pas savoir jusqu’où ira sa rage. Cette attitude et ces paroles du réalisateur peuvent toutefois donner, aux personnes avisées, une idée du contexte à l’intérieur duquel cette émission a été réalisée.
Gilles:Benoît te garde dans ses locaux au Centre Entrain et tu continues de donner tes cours de spinning?
Stéphane:Pour le spinning, tout demeure normal, je continue à donner des cours et les gens continuent à y assister. Quand aux locaux, la Clinique naturopathique de la Cité loue un local situé à l’intérieur du club Entrain, c’est tout. Il n’y a aucun lien d’affaires entre les deux.
Gilles:Comme tous les cyclistes ou autres sportifs de la région qui te connaissent, j’ai le plus grand respect pour toi comme athlète, et j’ai entendu juste du bien de tes talents de coach ou de coach de spinning. J’ai jamais pensé à juger tes activités de naturopathe. Éternel sceptique, je suis pas porté sur les suppléments, machines, produits ou remèdes «alternatifs», mais je me disais que tu devais à tout le moins ne pas risquer la santé de tes clients avec ces solutions. Mais là, on me dit que tu vendais un produit (Miracle Bion) en sachant sciemment qu’il avait été interdit par Santé Canada car pouvant contenir la bactérie E.Coli. Est-ce bien vrai ?
Stéphane:En novembre 2005, un inspecteur de Santé Canada est arrivé à la Clinique naturopathique de la Cité en exigeant le retrait du Miracle Bion du marché. Nous avons alors immédiatement cessé de vendre ce produit. Pendant les jours suivants, ils nous ont constamment interpellés de façon plus ou moins cohérente, ce qui nous a mis la puce à l’oreille. Nous avons alors fait appel à un conseiller légal qui, après analyse du dossier, nous informa que les agissements de Santé Canada n’étaient pas légaux et que j’avais des droits et des recours si besoin était. Il leur envoya donc une lettre les enjoignant de faire désormais affaire directement avec lui. Santé Canada changèrent alors d’attitude et devinrent beaucoup plus posés dans leurs interventions, qui ont à toute fin pratique cessé à ce moment.Nous avons fait réaliser des tests par un laboratoire indépendant qui ont confirmé qu’il n’y avait aucune colonie bactériologique de E Coli. Mon conseiller légal a avisé Santé Canada par écrit que la Clinique naturopathique de la Cité allait recommencer à vendre le produit, à moins qu’ils ne prouvent leurs allégations à l’effet que le produit était dangereux pour la santé. Pas de nouvelles d’eux.Par la suite, j’ai informé systématiquement les gens qui voulaient acheter le Miracle Bion de l’avis émis par Santé Canada. Au printemps 2006, ces derniers, qui n’avaient toujours pas apporté de preuves pour soutenir leurs allégations, ont quand même émis leur communiqué comportant ces mêmes allégations sur le Miracle Bion. Nous leur avons alors demandé à nouveau de prouver ces allégations, mais ils n’ont jamais donné suite à nos requêtes à cet effet ni à notre invitation à les rencontrer. Nous avons donc dû en venir à déposer une plainte en libelle diffamatoire contre eux.
Gilles:Intéressant. As-tu une copie de ces tests de laboratoire?
Stéphane:Oui, j’ai ça ici, tu peux jeter un coup d’oeil.
Gilles:Ouin, chuis pas biologiste mais on dirait qu’il y en a un ti-peu, non?
Stéphane:La lecture est en UFC/ml, soit Unité Formant des Colonies. Le système qu’ils ont utilisé est un système par filtration soit celui le plus précis selon les affirmations du micro-biologiste qui a fait le test et la présence est sous le seuil minimum de 5. Sous ce seuil, ils ne détectent plus rien. En clair: aucune présence avec ce type de test.
Gilles:Penses-tu que c’est Santé Canada qui t’a «dénoncé» aux journalistes de radio-Canada?
Stéphane:Je l’ignore. C’est une possibilité étant donné l’accès de rage au téléphone du réalisateur en juin dernier. Par ailleurs, les journalistes de Radio Canada sont apparus trois jours seulement après le dépôt de la plainte en libelle diffamatoire contre Santé Canada.
Gilles:Considères-tu que le journaliste de Radio-Canada s’est acharné sur ton sort après que tu aies refusé de donner une entrevue?
Stéphane:Oui. Radio-Canada connaissaient la raison de mon refus: l’action en libelle diffamatoire contre Santé Canada pour l’émission de leur communiqué. Mon envie de les rencontrer était très forte et nous leurs avons donc offert une entrevue par écrit, avec réponses par écrit. Ils ont déclinée. Également mon conseiller légal a toujours maintenu sa recommandation de ne pas donner d’entrevue à la télévision. Je me suis donc résigné à garder le silence. De son côté, Radio-Canada a quand même choisi de se baser sur ce communiqué et de ne pas mentionner la raison de mon refus.Après 3 appels de Radio-Canada comportant à chaque fois un motif différent pour me rencontrer, je leur rappelle que je ne peux faire d’entrevue télé pour ne pas nuire à la poursuite. Dès lors, les journalistes se sont présentés à la clinique sans prévenir, ils m’ont appelé sans cesse, sans tenir compte que cela avait pour effet de créer un climat difficile pour les employés de l’Entrain et de la clinique médicale qui assistaient à tout ce défilé stressant. J’ai donc dû envoyer une mise en demeure à Radio-Canada exigeant qu’ils cessent ce harcèlement, toujours étant donné que je ne pouvais donner d’entrevue télé et toujours compte tenu de la poursuite intentée contre Santé Canada. C’est alors que j’ai reçu un appel du réalisateur de l’émission qui a fini, comme je le mentionnais plus haut, par crier au téléphone que je le regretterais et qu’il allait ben mal me faire paraître. À ce moment, ils m’avaient déjà filmé 2 fois à mon insu. Donc, pour répondre à ta question, oui, ils se sont acharnés pour obtenir une entrevue qu’ils savaient que je ne pouvais donner, mais aussi sur mon cas en particulier durant les 2 émissions, exactement comme il me l’avait «annoncé» en juin.
Gilles:As-tu un recours légal quand ils te filment à ton insu? Ils peuvent filmer ce qu’ils veulent et diffuser ce qu’ils veulent?
Stéphane:Oui, il y a des options. Par contre, elles ne peuvent être élaborées maintenant dans cette chronique.
Gilles:Santé Canada a aussi mal paru que les autres intervenants de cette émission. Ils ont vraiment pas l’air d’avoir le contrôle dans votre secteur d’activités. Sommes-nous bien servis par ces gens?
Stéphane:Je ne souhaite pas faire la critique de cet organisme de façon générale. Dans le cas précis du dossier qui les oppose à la Clinique naturopathique de la Cité toutefois, il y a eu de fortes irrégularités qui n’auraient pas eu lieu d’être.