En France avec Pierre Gendron, partie 2: Les premières randonnées

La suite des aventures de Pierre…


Le premier matin, nous déballons nos vélos des sacs, les remontons et décidons de la route à faire cette journée-là. Pourquoi pas St Tropez via La Garde-Freinet. Un soixantaine de kilos faits de bonnes montées et descentes sur des routes qui serpentent comme si elles hésitaient à arriver à destination.

Nous croisons une cycliste allemande qu’il était très agréable de suivre dans la roue. Elle en était à sa deuxième semaine dans la région et ses suggestions de parcours furent très utiles. Plus tard, dans une très longue descente (un accotement cyclable est spécialement aménagé et a un revêtement spécifique (en matière orange) très adhérant), un groupe de hollandais nous passe …cavalièrement à la limite «en baveux»; la fibre coureur de mon ami Georges et moi se dénoue et nous voilà en poursuite, le raccord se fait -évidemment- rapidement; dans la montée qui suit, nous faisons la conversation avec eux. Des bons gars qui connaissent le Mont Ste-Anne et se disent surpris que nous ne soyons pas en ski chez nous. Nous sommes en mai… man! Pour faire encore plus cliché, voulez-vous qu’on mette nos habits rouges de la GRC?

À St Tropez, nous trempons le gros orteil dans la Grande Bleue et ensuite retournons à la maison avec arrêt obligatoire à un troquet, en face du boulodrome, pour en goûter une petite fraîche. Plus tard, c’est l’apéritif sur le balcon de notre maison pendant que dans un foyer BBQ des saucisses se bronzent à l’ardeur de braises que laissent les sarments en s’éteignant. Du bois de vieille vigne, ça fait du bon charbon de bois.

Les jours se passent de la même manière, seuls les itinéraires et les rencontres changent. Un matin, au milieu de nulle part, nous rejoignons à la sortie du bourg de La Mour (3 maisons et un moulin abandonné) un peloton composé à la fois de vieux cyclistes à la peau tannée par le vent sec et le soleil et à la fois par d’autres à la peau étirée autour de ventres qui ont dû travailler double horaire devant une table pendant une bonne partie de leur existence. Après les avoir salués, je me mets à l’arrière pour étudier leurs comportements cyclistes: ça mouline et change rapidement de braquets, ils maintiennent un rythme constant de pédalage. Ils se font des remarques en patois provençal ou autre langue ésotérique. La rigolade est de rigueur. Quand nous lions conversations, ils sont surpris de voir que des gens des glaces fassent du vélo de route. Des traits d’humour sont lancés, persillés de «jokes de gars». Décidément nous sommes au bon endroit avec les bonnes personnes. Le vélo c’est international. Si Marx n’avait pas été si pogné il aurait sûrement dit un jour «Cyclistes du monde, unissez-vous».

En vrac:

  • À défaut de GPS, Georges a inventé un truc de navigation merveilleux: le matin, à partir de la carte du trajet prévu, Georges photographie les endroits choisis avec sa caméra numérique et quand sur les routes le besoin se fait sentir, il allume son appareil en mode lecture et trouve le bon chemin sur le petit écran. Ça marche tout le temps. Il faut par contre avouer que se perdre amène souvent des rencontres inoubliables. Il existe une sympathie française pour les cyclistes qui ouvrent les portes au touriste à vélo, surtout s’il y a un dialogue qui fait se mixer un accent provençal avec un de Limoilou. Et comme tout le monde a fait du vélo dans ce pays, les distances données ne sont pas des «miles d’habitants» comme on dit chez nous. Les distances données sont très proches de la réalité
  • Pour ce qui est des pièces et vêtements de vélo, dans un rayon de 50 km il y a toujours un endroit capable de régler les problèmes; et les prix sont très intéressants sur les vêtements et pneus
  • Le matin, les petites routes sont souvent sillonnées par un tas de ti-vieux retraités qui prennent l’air ou remontent dans leur tête un Champs-Élysés imaginaire en quête d’un maillot jaune élusif comme les jours qui passent trop vite. Tous ces maillots bigarrés, font de la belle couleur dans les champs printaniers verdis par des jeunes vignes alignées comme les enfants dans les cours d’écoles primaires ou parmi les fragiles coquelicots qui s’agitent des pétales sous le vent comme autant de papillons qui ne peuvent se libérer de leur laisse verte et s’envoler.
  • Malgré les côtes et cols que nous favorisons dans nos choix d’itinéraire, nous remarquons que nos efforts ne nous font suer que très peu et que la respiration reste facile. L’air sec sûrement… ou le rosé.

Mais tout n’est pas si idyllique. Le drame nous guette