Parlons Ultimate XC avec Dan Desrosiers

Le raid Ultimate XC, organisé au Mont-Tremblant, s’est fait un nom l’an dernier dans le cercle des coureurs en vélo de montagne. Les plus crinqués connaissaient déjà cette épreuve épique qui se déroulait dans le coin de Jay Peak. Quand la course est déménagée à Tremblant en 2010, la merde a pogné avec la fédération québécoise des sports cyclistes, parce qu’on voulait fédérer l’événement, que l’organisateur jugeait non fédérable. Des menaces de suspension sont venues assombrir encore plus le portrait, et la noirceur est tombée quand la fédé a effectivement suspendu les coureurs licenciés qui ont osé braver les avis répétés de la fédé. L’épreuve est devenue une sorte de «mouton noir», un gros méchant raid avec un gros méchant organisateur qui se plait à défier notre bien-aimée fédération.


Avant le départ, des espions de la FQSC sont partout sur le site, prenant des photos des coureurs pour bien documenter les dossiers des suspensions à venir.


Travis Pastrana, de Québec, qui a délaissé un lucratif contrat avec Red Bull pour joindre le prestigieux club Brynd Smoked Meat, en route pour la 5e place.

La situation a changé en 2011, alors que l’événement a accepté de se fédérer. Afin de dissiper tous les nuages noirs qui pourraient persister dans le firmament du sport cycliste, nous jasons avec le grand manitou du Ultimate XC, Daniel Desrosiers.

Gilles:L’an passé, tu n’étais aucunement intéressé à fédérer le Ultimate XC. Cette année, tu as accepté de le faire, au grand soulagement de nos amateurs de raids. Qu’est-ce qui a changé pour justifier cette volte-face?
Daniel:En fait, il n’a jamais été question que je ne voulais rien savoir de la fédé, mais plutôt que j’étais dans le jus à lancer la première édition de la course par étapes au Canada et que je ne connaissais pas la fédé et, surtout, je n’avais pas le temps de me faire de nouveaux amis.Le tout a tourné au vinaigre quand, après avoir rapidement évalué leur offre de service, j’ai jugé que leur apport n’était pas une valeur ajoutée pour mon événement.Je laisse la suite à votre imagination.
Gilles:Pas besoin de trop d’imagination pour comprendre la suite. 🙂 Parlons du format du raid. Ce n’est pas pour les moumounes. Résume-nous rapidement la distance et difficulté.
Daniel:Le 100 km compte plus de 10,000 pieds de grimpe avec très peu de sections roulantes. Le parcours est technique et soutenu. La majorité des tops ont fait le raid en un peu plus de 8 heures l’année dernière.Le 50 km est la partie la plus ardue du 100 km, donc même si les gens veulent participer uniquement au 50 km, c’est un énorme morceau et c’est pourquoi toutes les courses qualificatives sont de longs raids au Québec.
Gilles:As-tu peur de ramasser des coureurs épuisés dans le parcours, du genre qui embarquent dans un raid sans savoir s’ils ont ce qu’il faut pour se rendre jusqu’au bout?
Daniel:Non, tous les coureurs sur le 100 km sont approuvés par moi personnellement justement pour m’assurer qu’ils soient capables de le compléter et d’avoir du fun.Pour ce qui est du 50 km, ils doivent s’être qualifiés dans d’autres raids au Québec pour pouvoir faire notre 50 km.
Gilles:Qu’entends-tu par «se qualifier»? Si je regarde le calendrier, il n’y a que le raid de Charlevoix avant le tien. Vas-tu prendre aussi en compte des résultats des années passées? Quel pourcentage du gagnant de sa catégorie devra faire un coureur pour que tu daignes l’accepter dans ton épreuve?
Daniel:On regarde les résultats de 2010 en rapport avec ceux de coureurs et coureuses québécois qui s’en sont bien tirés au Ultimate XC l’an passé.
Gilles:Ceux qui n’ont pas la forme requise pour faire l’épreuve ont-ils d’autres options? Parcours plus court, plus facile, peut-être?
Daniel:L’option relais sur le 50 km en équipe est la solution.
Gilles:Combien ça coûte?
Daniel:Le double des autres raids au Québec.
Gilles:Faudrait que tu nous fasses un spécial, pour nos lecteurs.
Daniel:Je ne peux pas vous faire de rabais sur l’inscription individuelle, mais je peux en faire un gros sur le tarif du 50km en équipe: 50% de rabais! En plus, on va rendre l’offre moins restrictive. On va permettre des equipes de 3,4,5,6 et 8 et nous allons charger 70.00 dollars par participant seulement. Cliquez ici pour les détails.
Gilles:Excellent, merci. Maintenant, je serais curieux de savoir comment tu en es venu à organiser une telle folie. D’où viens-tu? Quel âge as-tu? Est-ce ton background sportif qui te pousse vers ce genre de difficulté?
Daniel:J’ai 51 ans, je suis un gars d’ultra endurance de multi sports, c’est-à-dire la course à pied en forêt et le vélo de montagne. Quoique toutes les longues rides de bike (entre 6 et 12 heures se font tous sur des routes secondaires avec mon cyclocross) je refuse de rouler sur la route… à mon avis, c’est plate et dangereux.Le Ultimate XC est né par accident. Mon terrain de jeu est Jay Peak au Vermont, où je demeure toujours et m’entraîne. Puisque les montagnes du Vermont sont longues et grosses, le 100 km à l’époque n’avait que 5 côtes à monter… 2000 pieds chacune, dans le bois. Alors pour moi, il est normal dans une grosse ride ou événement que tu forces et que tes jambes brûlent. Puisque je suis dans le jus en permanence, j’ai toujours fait deux courses de 24 heures en solo max par été. Je n’avais simplement pas le temps de faire plus question de famille. Mes longues rides se faisaient toujours la nuit. Je mettais les enfants au lit, à 10 heures je partais et je revenais à 4 du matin avant d’aller travailler… Tu vois le genre.Pour répondre à ta question, mes parcours sont essentiellement une extension de ma personnalité. Ils n’ont jamais été créés pour nécessairement attirer des foules ou des commanditaires, mais plutôt pour partager mon amour du sport de la façon sur laquelle je tripe.Je roule et course en gear fixe sur un vélo sans suspension et souvent mes entrainements se font sur mon cyclocross en plein bois. Est-ce que ce sont des parcours difficiles? Oui, mais ce n’est pas de ma faute si mère Nature me met des côtes dans la face comme défi.Si tu regardes à l’extérieur du Québec, le Ultimate XC n’est pas si marginal et difficile que ça. C’est certain que si tu le compares à l’offre existante ici au Québec, c’est un monstre. Par contre, c’est la course parfaite pour te préparer pour des 100 miles aux États-Unis comme le Leadville 100 ou les courses comme la BC Bike Race ou le Trans Rockies.
Gilles:Je ne sais pas si tu connais le stéréotype du commissaire de la FQSC, aux dents acérées, qui s’amène à ton épreuve avec sa brique et son fanal, prêt à remettre en question les moindres aspects de ta course. Je blague bien sûr, mais tout de même, à quel genre de relation t’attends-tu avec les commissaires qui vont s’amener chez vous?
Daniel:Je n’ai aucune idée, puisque je n’ai jamais fait de course au Québec. Toutes mes courses ont été aux États-Unis et en Ontario, et typiquement les événements d’ultra endurance ne sont pas fédérés.Je suis fondamentalement une personne intolérante à l’incompétence et au stress. Si quelqu’un se présente à un de mes événements avec une brique et un fanal, il devra malheureusement quitter les lieux de la compétition et aller réfléchir dans son coin comme à la petite école. Je n’ai vraiment pas le temps de dealer avec ça.Je n’ai aucune inquiétude de ce côté et d’ailleurs une de mes requêtes à la fédé est d’avoir le commissaire le plus calme et compétent qu’ils ont, puisque son mandat sera clair et il devra remplir les fonctions précises sur lesquelles nous nous sommes entendus. Assez simple.2011 sera une année critique pour notre relation future. Nous nous sommes exceptionnellement fédérés en 2011 pour voir si l’achalandage des membres de la fédé sera justifié en nombre d’inscriptions. Certaines clauses de notre entente, quoique confidentielle, engendreront des dépenses énormes pour notre organisation en 2012 si nous décidons de rester fédérés et nous devons évaluer en 2011 si notre association avec la fédé pourra justifier ces dépenses.De toute évidence, vous comprendrez que si on perd de l’argent parce que nous sommes fédérés, notre position devra être réévaluée pour les années à venir.
Gilles:Je regrette de ne pouvoir essayer cette course cette année, je serai moi aussi en mode ultra-marathon cette fin de semaine là, avec le 1000 km de Pierre Lavoie et je penserai à vous. Souhaitons que ça marche fort et que la hache de guerre reste enterrée pour que ce raid nouveau genre fasse partie du calendrier officiel pour les siècles à venir, amen.

Pour plus d’infos, consultez :


Daniel Desrosiers, au centre, en compagnie d’obscurs coureurs des 36h de la forêt Montmorency plus tôt cet hiver.